Rebaptisé « Che » en référence à cette expression qui ponctue les phrases en Argentine, Ernesto Guevara est né le 14 juin 1928 à Rosario (Argentine). Touché par l’asthme dès son plus jeune âge, le jeune argentin n’est cependant pas effrayé par l’aventure : à 23 ans, il entame son premier long périple au travers de l’Amérique Latine (voir le très beau film : Diario de motocicleta). Au volant de sa moto et, accompagné par son ami Alberto Granado, il traverse tout le continent et se rend à Miami. Deux ans plus tard, il remet ça, direction le Mexique ! Durant, ces périples le Che se rend compte à quel point les sud-américains souffrent : exploités, nombre d’entre eux sont d’une pauvreté extrême. Le Che commence à acquérir une conscience politique grâce à son parcours au cœur du continent mais aussi, par ses nombreuses lectures allant de la philosophie à la politique, en passant par la poésie.
Fort de cet enrichissement culturel, le Che devient un leader politique de premier plan et, bientôt, une rencontre fera basculer sa vie dans l’action politique. Nous sommes en juillet 1955, il rencontre un certain Fidel Castro, alors en exil politique au Mexique. Et bien vite, le Che se sent concerné par le sort des Cubains, opprimés par une dictature de Battista qui les prive de toute liberté. Le 2 décembre 1956, il se fait embarquer dans l’aventure révolutionnaire par Castro : le débarquement à Cuba est un véritable échec. Mais, il reste une vingtaine de fidèles qui s’installent dans l’est de l’île. Et, ils se battent comme un armée de plus de mille hommes puisque, le premier jour de l’an 1959, Battista s’enfuit : c’est la victoire. Après avoir été nommé ministre de l’Industrie et, avoir allumé quelques mèches contre l’impérialisme (voir vidéo), le Che disparaît de la scène politique cubaine (été 1965). Motif ? Il ne partage pas la volonté de Castro de s’allier avec l’Union soviétique. Pour lui, c’est aussi une forme d’impérialisme inacceptable.
Deux dernières années de guérilla en guérilla
En bon internationaliste, le Che passe ses deux dernières années de vie à aider d’autres rebelles à se libérer du joug des dictatures. D’abord au Congo, où il aide les rebelles menés par Laurent-Désiré Kabila (qu’il quitte vite en voyant leur façon d’agir très individualiste) et, ensuite, en Bolivie. C’est là qu’il meurt (probablement sur ordre de la CIA), le 9 octobre 1967, à la tête d’une troupe de 30 guerriers qui tentaient de renverser le régime d’extrême-droite soutenu par les USA.
40 ans après sa mort, on le voit partout. La venue de Camillo Guevara (son fils) à l’Université Libre de Bruxelles était l’occasion de revenir sur ce destin hors du commun. A vrai dire, j’ai été particulièrement déçu par le côté « patriote cubain » de Camillo. Son père était plutôt un internationaliste. Bien que citoyen cubain, il se voyait plutôt citoyen Sud-Américain. Aujourd’hui occupé à entretenir la mémoire de son père mais aussi, au travers de la fondation Che Guevara, à mettre sur pied des projets humanitaires ou éducatifs, il a tenté de répondre à quelques questions sur le Che qu’il a, à dire vrai, très peu connu.
A l’heure actuelle, on voit l’image du Che partout : t-shirt, sacs, pulls, manifs… Pourtant, cela aurait déplu au personnage. Ce qu’il faut retenir selon Camillio Guevara c’est « …qu’il a ressemblé beaucoup de valeurs de grands penseurs, de révolutionnaires qui étaient là avant lui. Il s’est approprié le meilleur et en a fait une synthèse originale… Il était un vrai révolutionnaire, il voulait transformer la société en bien. Son but premier était de mettre tout en œuvre pour restaurer la dignité humaine de tous les sud-américains. Il s’est réellement sacrifié au point de travailler 16 à 20h par jour. Nous-mêmes ne le voyions presque jamais. Pour moi, c’est plus une figure révolutionnaire que mon père. »
Pour le reste, beaucoup de questions sont soulevées à l’heure actuelle sur le rôle de Che dans l’assassinat de plusieurs soldats de Battista. Sans vouloir me faire partisan invétéré, il me semble qu’au-delà de la figure révolutionnaire, le Che n’était pas un homme sanguinaire comme il est décrit par certains. Toute guerre connait, malheureusement, son lot de morts. Des voix se lèvent face à la cruauté présumée du Che qui aurait participé à des fusillades d’opposants capturés. « 40 ans après, certains essaient de salir l’image du Che par une campagne de désinformation. Il était trop subversif. Alors on le commercialise, on le traite d’assassin froid et sanguinaire. Après la Deuxième Guerre Mondiale, il y a eu Nürnberg. Là les nazis ont étés jugés et, pour la plupart, condamnés à la peine de mort. A Cuba, il y a eu la même chose : il fallait faire justice, beaucoup de gens avaient souffert et étaient morts durant la dictature. Mon père était juge de Cassation avec des huissiers qui notaient tout ce qu’il s’y passait. Sur les 8 cas qu’il a traités, il y a eu 2 condamnations à mort. Il n’a assisté qu’à une exécution. Aucun document ne prouve le contraire », ajoute Camillo Guevara.
Quatre décennies après sa mort, le Che reste un sujet de discussion intense. Reste que l’héritage politique qu’il lègue depuis deux générations, va bien plus loin que le phénomène marketing dont il est la victime actuellement. Car au final, combien de personnages sont encore des icônes politiques aujourd’hui ? Malcom X, Ghandi,… Il fait bien partie des grands de ce monde.
A.S.